Solennité de la Sainte Trinité - 27 mai 2018

Mt 28, 16-20

 

Il ne suffit pas d’être bon pour être saint. Combien de grand-mères désolées de l’incroyance de leurs enfants et petits-enfants les défendent au motif qu’ils ne vont certes pas à la messe mais qu’ils n’en sont pas moins généreux, ouverts, tolérants etc.
Le pape François s’était rendu le dimanche 16 avril dernier dans la paroisse Saint Paul de la Croix à Rome et il avait dialogué avec les enfants. Le premier lui avait demandé : quel est ton passage préféré dans l’Évangile, et pourquoi ? Posez-vous la question. Pour le Pape c’est la rencontre de Jésus avec Matthieu, cet homme d’affaires traître à la patrie, si attaché à l’argent. On y voit la force qu’a Jésus pour changer un cœur. Charlotte avait demandé : les personnes qui ne sont pas baptisées, est-ce qu’elles sont enfants de Dieu ? – Que te dit ton cœur ? avait répondu le Pape. Oui. Oui. Même les mafieux sont enfants de Dieu. Ils préfèrent se comporter comme des enfants du diable, mais ils sont enfants de Dieu. Le troisième, Edouard avait voulu savoir : qu’as-tu ressenti quand tu as été élu pape ? Je n’ai rien ressenti de particulier, je n’ai pas senti de peur, je n’ai pas senti de joie spéciale. J’ai senti que le Seigneur voulait cela, et que j’avance. Le dernier, Emmanuel  n’osait pas avancer. Le Pape lui a dit : viens et dis-le moi à l’oreille. Puis il a dit : Ah, si nous pouvions tous pleurer comme Emmanuel, quand nous avons une douleur comme il en a une dans son cœur. Il pleurait son papa et il a eu le courage de le faire devant nous, parce que dans son cœur, il y a l’amour pour son papa. J’ai demandé à Emmanuel la permission de dire la question en public et il m’a dit oui. Alors je vais la dire : « Il n’y a pas longtemps, mon papa est mort. Il était athée, mais il a fait baptiser ses quatre enfants. C’était un homme bon. Est-ce que papa est au ciel ? » Comme c’est beau, un fils qui dit de son papa : « Il était bon ». Un beau témoignage que cet homme a donné à ses enfants, parce que ses enfants ont pu dire : « C’était un homme bon ». C’est un beau témoignage d’un fils qui a hérité de la force de son papa et qui a eu le courage de pleurer devant nous tous. Si cet homme a été capable de faire de tels fils, c’est vrai, c’était un homme bon. Et il a conclu : Dieu était certainement fier de ton papa, parce qu’il est plus facile de faire baptiser ses enfants à un croyant, que de les faire baptiser à un non-croyant.

On peut être bon sans être saint. Il ne suffit pas d’être bon pour être saint. Il ne suffit pas non plus d’être juste pour être saint. Nous n’utilisons pas beaucoup ce terme que nous réservons au Christ, le seul Juste, comme lui-même Jésus réserve le mot bon à son Père : Dieu seul est bon. Pourtant, le sens de la justice devrait être la marque de reconnaissance du Chrétien : « Voici comment on distingue les enfants de Dieu et les enfants du diable : quiconque ne pratique pas la justice n’est pas de Dieu, et pas davantage celui qui n’aime pas son frère » (1 Jn 3, 10). « Homme, disait le prophète Michée, on t’a fait connaître ce qui est bien, ce que le Seigneur attend de toi : rien d’autre que pratiquer la justice, aimer la fidélité, et t’appliquer à marcher avec ton Dieu » (Mi 6, 10).
Le 3ème chapitre de la Lettre du pape François sur la Sainteté s’intitule « à la lumière du maître », parce qu’on peut dresser toutes sortes de théories sur la sainteté, mais rien n’est plus éclairant que de revenir aux paroles de Jésus : il a expliqué ce que veut dire être saint quand il nous a enseigné les Béatitudes (cf. Mt 5, 3-12). Elles sont d’abord son portrait, lui le seul Juste, et sont construites sur ce thème de la Justice qui est leur centre : Heureux ceux qui ont faim et soif de justice, et leur fin : Heureux ceux qui souffrent pour la justice.
Heureux êtes-vous si l’on vous maltraite et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi, le seul Juste.

Il ne suffit pas d’être bon pour être saint. Il ne suffit pas d’être juste pour être saint. Il faut encore une 3ème qualité, en voie de disparition : la simplicité. Elle est la 3ème condition de la sainteté après la bonté et la justice : le don de l’Esprit saint. Vraiment il est juste et bon, disons-nous au début de la Préface eucharistique … c’est quand même simple : Bon comme le Père, Juste comme le Christ, Simple comme l’Esprit.

Vous êtes-vous jamais demandé d’où vient ce sentiment que nous avons que le monde est de plus en plus complexe ? D’où vient ce sentiment d’une complexité croissante du monde, sinon du matérialisme qui domine, et pour ce qui nous concerne, d’une insuffisance d’Esprit de simplicité.

La Trinité est compliquée quand on oublie que Dieu est Amour. Saint Thomas d’Aquin, au début de la Somme théologique, entreprend d’examiner les principales qualités de Dieu. La première, après son existence (est-elle évidente ? est-elle démontrable ? etc.), est sa simplicité. Le signe de Dieu est dans la simplicité de la foi, disait saint Ambroise.

J’ai rencontré une jeune femme qui sortait de Polytechnique, prodigieuse d’intelligence, qui s’était fait intoxiquer par des amis à elle musulmans qui lui avaient mis dans la tête que notre religion est compliquée. La religion chrétienne compliquée ? Elle a toujours été méprisée parce qu’elle est la religion des tout-petits. Les commandements de Dieu compliqués ? Le préférer, lui être fidèle, aller à la messe le dimanche, le reconnaître dans les autres, s’employer à pardonner, c’est compliqué ? « Ah ! C’est un grand malheur, quand on a le cœur tendre, que ce lien de fer que la nature a mis entre l’âme et le corps, ces frères ennemis ! Ce qui m’étonne, moi, c’est que Dieu l’ait permis. Voilà le nœud gordien qu’il fallait qu’Alexandre rompît de son épée et réduisît en cendre » (Alfred de Musset). Qui connaît encore le nœud gordien ? Pas ceux qui passent leur temps à trancher, comme si la violence était la solution. La plupart des problèmes dépendent du temps que nous prenons pour les résoudre. Nous croyons, nous, à la prière. Nous prions Marie qui défait les nœuds.

Est simple ce qui n’est pas composé. On m’a demandé pourquoi l’apôtre Matthias avait été choisi plutôt que l’autre « Joseph appelé Barsabbas, puis surnommé Justus » ? Ses trois noms nuisaient à son identité. La facilité à nommer fait partie de la simplicité de relation. Le mystère de la Trinité est un seul Nom, Dieu, pour trois personnes. Nous nous signons au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et si l’un des trois est présent, les deux autres aussi. La simplicité de Dieu vient de son indéfectible unité.
Nous pouvons nous adresser à chacun des trois, non pas séparément mais personnellement. Cette relation personnelle fonde notre prière : je fais appel à la Bonté de Dieu ; je m’adresse pour cela à son Fils, comme Marthe dans l’évangile de saint Jean, quand elle dit à Jésus : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. Mais maintenant encore, je le sais, tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l’accordera. » (Jn 11, 22).
Et en disant cela, je sais que c’est l’Esprit qui me donne cette confiance. Tout est si simple quand on fait confiance. Dieu seul est bon, le Père de toutes miséricordes. Jésus-Christ est le seul Juste, qui rend juste. Et l’Esprit saint donne d’agir en confiance. Bonté du Père, Justice du Christ, Simplicité et confiance de l’Esprit-Saint. Dieu Bon, Juste et Simple.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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