4ème dimanche de l'Avent - 23 décembre 2018

Lc 1, 39-45

 

Chaque dimanche de l’Avent a sa coloration pour nous préparer à la célébration de Noël. Le 1er dimanche de l’Avent est le dimanche de l’Aurore, comme un jour qui se lève, le début d’une ère nouvelle, une nouvelle année liturgique. Nous étions invités à l’éveil. Détox ! Le 2ème dimanche de l’Avent est le dimanche de la lumière, à proximité de la fête du 8 décembre, avec l’arrivée de Jean-Baptiste, qui « n’était pas la lumière mais qui avait à rendre témoignage à la lumière ». Le 3ème dimanche de l’Avent est le dimanche de la Joie, vienne la rosée sur la terre. Ce 4ème dimanche de l’Avent est un dimanche de silence, de préparation intérieure, à deux jours de la naissance du Sauveur.

La messe de la nuit de Noël est la plus difficile de l’année quand les églises sont pleines à craquer de personnes qui ne vont à la messe qu’une fois par an, ce soir-là. Pourquoi ne viennent-elles pas plus souvent ? A cause de deux reproches que nombre d’entre elles font aux messes d’être incompréhensibles et ennuyeuses, incompréhensibles parce que les textes nous dépassent, et ennuyeuses, l’assemblée étant réduite à la récitation de formules. Bavardes et passives : Au secours ! Contemplons donc la Vierge Marie se rendant chez Elisabeth. La question n’est pas : à quoi pensait-elle ? Elle n’était pas comme le petit chaperon rouge, ni comme Pierrette avec son pot à lait, ni comme tant de ces personnages de fables. La question est plutôt : à quoi pensons-nous tandis que nous venons à la messe ?

Son entrée chez Elisabeth s’apparente au début de la messe quand le célébrant qui ne porte pas Jésus comme Marie, et encore, mais le représente, salue l’assemblée : Le Seigneur soit avec vous. Ah si notre âme pouvait tressaillir en nous, quand nous entendons cette salutation !

Elisabeth attendait Marie. Par une intuition naturelle, que connaissent ceux qui ont un chien ou un chat et le trouvent en arrivant chez eux les attendant depuis plusieurs minutes derrière la porte, ayant mystérieusement pressenti leur retour.

« Quand nous allons à la Messe, dit le pape François, nous arrivons peut-être cinq minutes à l’avance. C’est le moment du silence pour nous préparer au dialogue. Prier, comme tout véritable dialogue, est également savoir demeurer en silence avec Jésus. C’est le moment de nous recueillir dans notre cœur pour nous préparer à la rencontre avec Jésus. Nous n’allons pas à un spectacle, nous allons à la rencontre du Seigneur et le silence nous prépare et nous accompagne » (Catéchèse du 15 novembre 2017).

Il y a trois silences préparatoires à cette rencontre : un triple silence compose le rite d’entrée, avant le début de la messe, puis au Je confesse à Dieu, avant la reconnaissance de nos péchés, et le troisième avant la prière d’ouverture. Le premier est le plus difficile, de transition entre nos activités : c’est là que nous faisons des économies de temps en juxtaposant au maximum nos activités de la journée, en ne prenant pas le temps de respirer. Ceux qui disent qu’ils ont besoin de ‘souffler’ sont en fait ceux qui ont besoin d’inspirer, de se poser avant de commencer quoi que ce soit : ils vivent en apnée, ne prenant pas le temps de respirer.

Le deuxième silence préparatoire est moins d’introspection que de récapitulation, en activant notre conscience de ce que nous voudrions améliorer et changer : ‘je confesse à Dieu que j’ai péché’ n’est pas une formule vague ni générique ; elle suppose que nous ayons vraiment à l’esprit ce que nous confessons.

Le troisième silence est le moins connu : « après le Gloria, ou en l’absence de celui-ci, immédiatement après l’acte de pénitence, la prière, explique le Pape François, revêt une forme particulière dans une oraison qui exprime le caractère propre de la célébration. Avec l’invitation ‘prions’, le prêtre exhorte le peuple à se recueillir avec lui dans un moment de silence, afin de prendre conscience d’être en présence de Dieu et de faire ressortir, chacun dans son cœur, les intentions personnelles avec lesquelles il participe à la Messe. Chacun pense aux choses dont il a besoin, qu’il veut demander, dans la prière ». Le Pape a vivement recommandé « aux prêtres d’observer ce moment de silence et de ne pas se presser : ‘prions’, et que l’on fasse silence. Sans ce silence, nous risquons de négliger le recueillement de l’âme ».

Ce triple silence préparatoire est le premier temps solennel de recueillement à la messe. Le deuxième suit l’homélie et prépare au Credo, à la profession de foi. Le rôle de l’homélie est de nous aider à entendre de façon personnelle une des paroles proclamées dans les textes du Jour. Idéalement vous devriez sortir de la messe avec une phrase de l’Ecriture, une image ou un geste de Jésus, qui vous nourrisse dans votre connaissance intérieure de Dieu. Essayez cela après chaque messe : quelle est la phrase que je retiens, à méditer ?

Ce qui se passe à l’offertoire est comparable aux pensées qui agitaient les Apôtres au soir du Jeudi saint tandis qu’ils accompagnaient Jésus au mont des Oliviers. L’offertoire est un temps de transition entre les deux grandes parties de la messe que sont la liturgie de la Parole et la liturgie de l’Eucharistie. C’est le temps du symbole, si on l’entend comme le lien qui est fait entre deux réalités, terrestre et céleste, humaine et divine.
L’offertoire est symbolique pour que la consécration ne le soit pas. La consécration n’est pas symbolique mais réelle, historique et eschatologique, œuvre suprême de la Charité du Christ, célébrée dans la Foi, ouvrant notre Espérance. L’élévation par le prêtre de l’Hostie puis du Calice signent les deux commandements de l’amour, l’amour de Dieu réellement présent, et l’amour du prochain, jusqu’au sacrifice de soi.

Enfin, le cinquième temps solennel de recueillement se situe après la communion, temps d’action de grâce, de gratitude immédiate. Nous apprenons à la messe à remercier le Seigneur du don de sa vie et de notre vie, sans attendre la fin de notre existence mais en accueillant sa présence. Pourquoi allons-nous à la Messe ? Pour remercier Dieu. Je sais que certains se disent : on va attendre la fin (de notre vie) pour voir … Un peu comme dans l’histoire des dix lépreux qui supplient Jésus de les guérir : il les envoie aux prêtres, ils sont purifiés en chemin, un seul revient pour rendre Gloire à Dieu. Ayez cela en tête car c’est essentiel à Noël : la gratitude doit être immédiate. C’est un principe de vie et de prière, de commencer par la louange du matin, les laudes, rendre gloire à Dieu. Le sujet n’est pas la politesse, mais notre participation : à l’égard de Dieu, l’action de l’homme sera toujours infiniment petite, mais c’est autre chose que l’inaction passive. Le Christ a souffert la passion pour que nous ne restions pas dans la passivité. Le modèle indépassable est la Vierge Marie, dont la visite à Elisabeth précède son cantique d’action de grâce. Merci Seigneur de toute rencontre que tu nous donnes de vivre.

On dit souvent à propos de la Visitation que Marie s’est rendue chez Elisabeth parce que l’Ange lui avait parlé d’elle. Mais si c’était le contraire ? Si l’Ange lui avait parlé d’Elisabeth parce qu’Elisabeth était importante pour Marie ? Mieux encore : et si Dieu avait choisi Elisabeth à cause de Marie, pour l’aider, la conforter, la soutenir. C’est logique puisque Jean-Baptiste est ‘orienté’ vers Jésus : il est donc logique que Elisabeth le soit aussi vers Marie.

Qu’est-ce que cela signifie ? Que Dieu nous envoie les personnes dont nous avons besoin. Telle est sa Providence, sa bonté, de nous donner les aides, les appuis nécessaires, et lorsque la parabole du jugement nous reproche de ne pas les avoir accueillis (c’est à moi que vous l’avez fait ou ne l’avez pas fait) ce reproche est d’autant plus fondé que Dieu les avait mis sur notre route, pour nous, peut-être plus que pour eux.

S’applique à Elisabeth pour Marie la parole de l’origine : je vais lui trouver une aide qui lui soit assortie. Il n’est pas bon que Marie soit seule, je vais lui trouver une aide qui lui soit assortie, ce sera Elisabeth sa cousine, avec qui elle a un lien privilégié, et, à l’annonce de l’Ange, le cœur de Marie exulte déjà : chouette, c’est elle ! Imaginez qu’on vous confie un travail, une mission, déconcertante, et la personne qui vous la confie, l’autorité ajoute : tu ne seras pas seul, je te propose de le faire avec cette autre personne, dont il se trouve qu’elle est pour vous le choix inespéré. Le Seigneur met sur notre route les personnes dont nous avons besoin.

Je vous propose en cette fin d’année d’en faire la relecture, le bilan suivant ce critère : en faisant mémoire des personnes qui ont pris place dans votre vie cette année, de façon nouvelle, dont vous avez fait la connaissance, ou de façon accrue, qui ont pris une place plus importante. Ce sont les bonnes questions pour cette relecture de l’année, davantage que les événements ou les lieux qui vous ont marqués : les personnes. Dieu nous voit dans nos relations les uns avec les autres, non comme des êtres isolés, des monades disait Benoît XVI, mais comme des relations vivantes.

D’où la 1ère question : quelles sont les personnes qui sont entrées positivement, de façon fructueuse, dans votre vie cette année ? On pourrait dire qui sont devenues des amis, mais qui vous ont changé, marqué, ont embelli votre vie ?

2ème question, sur celles qui étaient déjà là mais jouent un rôle accru : quelles sont les personnes qui sont, pour reprendre ce concept des réseaux sociaux, vos influenceurs ou influenceuses ? Avant on parlait de maîtres à penser, tandis que les influenceurs interviennent dans le domaine de la consommation, les uns et les autres sont déterminants pour notre liberté. Qui vous a influencé cette année ?

3ème question : où est le Christ dans ces relations, aussi bien nouvelles qu’accrues ? Faire la relecture de l’année, c’est regarder notre marche tant personnelle que commune vers le Christ, c’est le principe de la messe. Dans sa régularité comme dans notre participation : ensemble. En croissance, stagnante, ou en recul ?

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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