Sainte Marie Mère de Dieu - 1er janvier 2017

Lc 2, 16-21

Que signifie le silence de la Vierge Marie ? Si c’est bien ‘en silence’ que « Marie gardait tous ces événements et les méditait dans son cœur ». Est-ce que cela correspond à ce que saint Paul dit des femmes, qu’elles doivent « garder le silence dans les assemblées » (1 Co 14, 24) dans un passage qui nous gêne d’autant plus qu’il le redit dans une autre Lettre où il ne « permet pas (sic) à la femme d’enseigner ni de faire la loi à l’homme » (le dominer) (1 Tim 2, 12). Qu’elle garde le silence, ajoute-t-il, et la traduction liturgique traduit pudiquement : qu’elle reste dans le calme ! C’est gênant, pour ne pas dire plus : cela nous fait honte.

La seule fois où la sainte Famille est représentée dans l’évangile autrement qu’à la naissance de Jésus, c’est à Jérusalem, Jésus a douze ans, et c’est Marie qui prend la parole : « Vois, ton père et moi, comme nous étions angoissés ». Joseph ne pense pas que c’est à lui de parler. Marie dit ce que nous aimerions que tous les hommes soient capables de faire : exprimer ce qu’ils ont dans le cœur.£En ce dimanche 1er janvier, je voudrais revenir, parmi les événements de l’année passée, sur la relance par le pape François de l’idée de femmes diaconesses. Certains ont dit qu’il s’était pris les pieds dans le tapis, mais ce qui est en jeu n’est rien moins que l’avenir de l’Eglise, la place des femmes dans sa hiérarchie.

La vitalité de l’Eglise dépend du poids de l’institution, comme Jésus s’est heurté en son temps à l’institution religieuse. Une vive tension s’est manifestée cette année en son sein au sujet de l’accès à la communion des divorcés remariés : des cardinaux ont exprimé leur désaccord (des ‘doutes’), car, pour eux, le rôle de la hiérarchie est essentiellement conservateur ; il ne faut rien changer, à la Loi.
Pourtant, la grande leçon de l’Histoire est que Dieu innove, et Dieu ne cesse d’innover. Nous disons que la vie est pleine d’imprévus, mais il faut appeler la nouveauté par son nom, et Dieu le dit clairement : Voici que je fais toutes choses nouvelles. C’est la fête et le signe de ce jour, la maternité divine de Marie : une Vierge rendue enceinte par l’action de l’Esprit saint donne naissance au Fils de Dieu, sans perdre sa virginité.

Vous ne croyez quand même pas que Dieu a cessé d’innover ?

Cette année de la Miséricorde a remis devant nos yeux un autre exemple d’innovation divine, avec le tableau du Christ miséricordieux, Jésus apparaissant à une religieuse inconnue, sainte Faustine, la chargeant de faire connaître au monde l’image de son Cœur sacré.

Evidemment ce sont des nouveautés relatives, ou plutôt ce ne sont des nouveautés que pour les esprits oublieux ou ignorants, qui ignoreraient que, trois siècles avant Faustine, Jésus était apparu à sainte Marguerite-Marie à Paray-le-Monial, ce sont les deux grandes apparitions du Christ dans l’Histoire, pour révéler son cœur, l’essence de la Révélation chrétienne, comme si seule une femme pouvait l’accueillir, c’est-à-dire l’engendrer, donner corps, vie à son esprit. Cette vision du Christ miséricordieux est celle du soir de Pâques, le Christ ressuscité montrant à ses disciples son côté ouvert et ses mains transpercées. Recevez l’Esprit Saint.

Jean-Paul II a donné à la Vierge Marie le titre explicite de « mémoire de l’Eglise ». Voilà ce que signifie ‘garder dans son cœur’ : faites cela, dit Jésus, en mémoire de moi.

Pourquoi ne pas créer un ordre des diaconesses adapté aux temps nouveaux, et permettre à des femmes de célébrer des baptêmes et bénir des mariages, puisqu’elles donnent la communion, président des célébrations, en particulier de funérailles, préparent au baptême et s’engagent dans le mariage ? Depuis longtemps elles enseignent, prêchent des retraites, écrivent des livres, et l’Eglise tient la notation de saint Paul sur le sujet comme obsolète, qui n’engage que lui-même comme lui-même l’avait écrit : ‘je ne permets pas’.

Pourquoi ne pas féminiser la hiérarchie de l’Eglise, et n’est-ce pas ce que l’on souhaite avec cet ordre de diaconesses : le temps n’est-il pas venu de distinguer l’ordre hiérarchique de l’ordre sacramentel ? La hiérarchie de l’Eglise est sacramentelle, qui part du Pape successeur de Pierre et des évêques successeurs des apôtres, cardinaux, évêques, prêtres, (presque) tous célibataires, appelés par Dieu et consacrés comme tels.

Nous ne ferons pas l’économie d’une révolution féminine de l’Eglise.

Un signe de cette nouvelle Pentecôte a été donné dans les années 30 par une jeune femme, Marthe Robin, en qui un prêtre aguerri, le Père Georges Finet, a reconnu la sagesse de Dieu et la puissance de l’Esprit. C’est elle, la femme qui chaque semaine vivait la Passion du Christ, et lui, le prêtre se tenait auprès d’elle comme une mère auprès de son enfant, comme tout prêtre auprès de l’humanité souffrante.

La béatification cette année du Père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus a couronné la façon dont cet homme au caractère fort, excellent officier de la guerre 14, est devenu disciple de la petite sainte Thérèse de Lisieux. Il ne montait pas en chaire pour parler d’elle avec la même témérité qu’il sortait des tranchées : après chaque conférence, il laissait l’assemblée bouleversée pour aller se cacher dans la sacristie, effrayé d’avoir osé s’approcher de si grands mystères.

Les Foyers de Charité créés par Marthe Robin sont des modèles de communautés et missions chrétiennes dans l’équilibre d’action entre un prêtre et une responsable, homme et femme au service de l’Evangile. Je n’ai jamais travaillé autrement, sans être conseillé, corrigé, éclairé, formé par des femmes. C’est la réalité de la plupart des paroisses, tenues par des femmes aussi décisives que le curé. Le problème de l’Eglise n’est pas que le pouvoir sacramentel soit confié aux hommes, mais qu’ils détiennent tous les pouvoirs y compris temporels. On sait comment s’accomplira la promesse que la femme écrase la tête de Satan : c’est en donnant aux femmes dans l’Eglise le contrôle de l’argent. C’est ce qui se passe dans l’évangile avec les femmes qui accompagnaient Jésus et les Douze, et les aidaient de leurs biens (Lc 8, 3). Voilà ce qui sera un tournant de la révolution féminine de l’Eglise, qui fera que les hommes seront forcés d’écouter les femmes, de reconnaître leur égalité, en étant financièrement dépendants : pour beaucoup d’hommes, l’écoute est intéressée.

Mon vœu au seuil de cette année est qu’en aucun domaine nous n’en restions au stade du vœu pieu, des théories et des idées, mais que, chaque fois, ces pensées et ces prières se concrétisent, s’incarnent, viennent au monde. C’est en ce sens que l’Esprit saint est féminin, puissance de fécondité, pas seulement charnelle, puissance de charité et de générosité.
Vierge Marie, toi qui as accueilli la Parole avant de l’engendrer, donne nous d’aimer non pas avec des paroles et des discours, mais par des actes et en vérité. En esprit et en vérité.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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