16ème dimanche du temps ordinaire - 19 juillet 2020

Mt 13, 24-43

 

D’où vient qu’il y a du mal dans le monde ? La question n’a pas changé au fil des siècles. Seigneur, d’où vient le mal : n’est-ce pas du bon grain que tu as semé dans ton champ ? D’où vient qu’il y a de l’ivraie au milieu du blé ? Le maître répondit : ‘C’est un ennemi qui a fait cela’, le texte porte littéralement : c’est un ennemi humain, anthroposen grec, homo, hominisen latin, inimicus homo. Etrange précision puisque dans son explication Jésus dit que l’ennemi qui a semé l’ivraie, c’est le Diable. Pourquoi donc, dans la parabole, le maître répond-il que l’ennemi est un homme, et pas le Démon, le Malin, le Mauvais ?
Pourquoi ? Pour que nous fassions attention à qui nous parlons du Diable : que nous n’en parlions pas à ceux qui ne connaissent pas Dieu.

« À vous », disait Jésus dimanche dernier dans la parabole du semeur, à ses disciples qui lui demandait pourquoi il parlait à la foule en paraboles, « à vous il est donné de connaître les mystères du royaume des Cieux, mais ce n’est pas donné à ceux-là ». Et il ajoutait, rappelez-vous, cette sentence difficile : « À celui qui a, on donnera, et il sera dans l’abondance ; à celui qui n’a pas, on enlèvera même ce qu’il a ».

Dans l’évangile de saint Luc cette phrase figure dans la parabole des mines, l’équivalent de la parabole des talents de saint Matthieu. Revenant régler ses comptes, le maître sanctionne celui qui se justifie de n’avoir rien fait fructifier : Serviteur mauvais, je vais te juger sur tes propres paroles : tu savais que je suis un homme exigeant, que je retire ce que je n’ai pas mis en dépôt, que je moissonne ce que je n’ai pas semé ; alors pourquoi n’as-tu pas mis mon argent à la banque ? À mon arrivée, je l’aurais repris avec les intérêts.
Retirez-lui cette somme et donnez-la à celui qui a dix fois plus. On lui dit : Seigneur, il a dix fois plus ! – Amen, je vous le déclare : on donnera à celui qui a ; mais celui qui n’a rien se verra enlever même ce qu’il a (Lc 19, 26).

Les paraboles du Royaume sont des paraboles de fécondité : il s’agit de porter du fruit. C’est la mission que Jésus nous a confiée par ses Apôtres : je  vous ai choisis, je vous ai établis, afin que alliez, que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure (Jn 15, 16).

Dimanche dernier, je vous proposais de tirer quelques leçons de la pandémie, de ces deux mois de confinement, et cette première leçon était la faible capacité de l’homme à tirer profit de son expérience du mal : l’épidémie n’avait rien d’imprévisible parce que le mal, la maladie et la mort ne sont pas des imprévus.

Les paraboles de ce dimanche nous invitent à avancer d’un cran, pour voir quels fruits nous avons tirés de ces deux mois, quel profit nous tirons des épreuves que nous vivons, comment nous arrivons à progresser quand les circonstances sont défavorables ou hostiles.

L’Esprit Saint a placé au milieu de la parabole du bon grain et de l’ivraie deux autres petites paraboles, l’une merveilleuse, invraisemblable, de la graine de moutarde qui devient un arbre où les oiseaux du ciel font leurs nids, et l’autre d’une parfaite banalité du levain dans la pâte.  Ce sont deux paraboles sur la grâce de Dieu, qui va jusqu’au miracle, notre Résurrection, mais s’inscrit dans le quotidien de nos vies, l’ordinaire de nos activités.

Un de mes amis père de famille a dit à son fils sur ces deux mois de confinement : retiens ça mon fils, souviens-toi de ce temps que tu auras eu la chance de vivre où le monde s’est arrêté, comme cela n’était jamais arrivé auparavant et n’arrivera sans doute plus, en tout cas de cette façon. Ce fut extraordinaire ! Et pour beaucoup invivable dans le manque de relations ou de distractions.

Pour les mariages que je célèbre, je demande souvent aux témoins de m’écrire quelques mots sur les fiancés, ce qu’ils aiment chez eux. J’ai lu cette jolie expression disant qu’il ou elle rend l’ordinaire extraordinaire. C’est le propre de l’amour : rendre l’ordinaire extraordinaire. La messe fait les deux, où nous offrons à Dieu l’ordinaire de notre vie pour qu’il la prenne avec Lui.

Ces deux mois de confinement furent deux mois sans messe, où les oiseaux du Ciel n’avaient plus l’arbre de l’Eglise pour y faire leurs nids. Dans une autre parabole, Jésus nous invite à les regarder, ces oiseaux du ciel : ils ne font ni semailles ni moisson, ils ne font pas de réserves dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit. Ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux ?
Votre Père céleste sait ce dont vous avez besoin. Cherchez d’abord son Royaume et sa justice, et le reste vous sera donné par surcroît. Ne vous faites pas tant de souci pour demain : demain se souciera de lui-même ; à chaque jour suffit sa peine (cf. Mt 6, 24-34).

Ainsi s’explique la phrase : à celui qui a, on donnera. A celui qui a la foi, on donnera la gloire.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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