Jeudi Saint - 28 mars 2024

Jn 13, 1-15

 

Que se passe-t-il après le lavement des pieds ?
Jésus est bouleversé en son esprit. Il annonce à ses disciples que l’un d’eux est un traître qui va le livrer. Ils se regardent les uns les autres, ne sachant pas de qui Jésus voulait parler (Jn 13, 21-22).
C’était l’évangile de mardi, du Mardi Saint : les évangiles des messes des trois premiers jours de cette Semaine sainte, lundi, mardi, mercredi, ont en commun la figure de Judas qui ouvre cette scène du lavement des pieds : « Au cours du repas, alors que le diable a déjà mis dans le cœur de Judas, fils de Simon l’Iscariote, l’intention de le livrer, Jésus se lève de table » …

Qu’est-ce qui a conduit Judas à trahir, qu’est-ce qui a causé sa perte ? L’évangile du Lundi Saint de l’onction à Béthanie répond : l’amour de l’argent.
Quand Marie répandit le parfum sur les pieds de Jésus, Judas regretta qu’on n’ait pas plutôt vendu ce parfum de grande valeur, et on aurait donné l’argent à des pauvres. « Il parlait ainsi, non par souci des pauvres, mais parce que c’était un voleur » (Jn 12, 6). Est-ce qu’on peut être un voleur sans devenir un traître ?

Demandons-nous plutôt : Qu’est-ce qui a poussé Judas à la trahison ?

Son orgueil. Sa certitude de mieux savoir que Jésus ce qu’il fallait faire, la stratégie à suivre, le chemin à prendre : la conviction que Jésus se trompait, avait échoué. Et, quitte à le quitter, autant que ce soit avec de l’argent, pour compenser les trois années qu’il venait de perdre à cause de lui. Partir avec de l’argent, c’est la différence entre le fils prodigue qui demande sa part d’héritage et saint François d’Assise qui y renonce complètement. La clé n’est pas l’argent, mais l’orgueil, la conviction de sa valeur supérieure.

Jésus a lavé les pieds de Judas pour lui donner la possibilité de se récrier, comme Pierre, pas pour les mêmes raisons, même à l’opposé, car Pierre avait un cœur pur, comme Jésus l’indique : « Vous-mêmes, vous êtes purs, mais pas tous » (Jn 13, 10). Judas pouvait encore, à ce moment-là, être sauvé. Il suffisait de dire : Seigneur, pardon !

Qu’est-ce qui l’en a empêché ? Son orgueil. Il en faut de l’humilité pour reconnaître ses torts !

Pendant ce Carême, j’ai parcouru avec vous les péchés capitaux qui sont à la source de tous les autres. Ils dessinent en négatif le portrait de Jésus Christ : il n’est pas gourmand, on l’en a accusé pourtant – « Le Fils de l’homme est venu ; il mange et il boit, et vous dites : “Voilà un glouton et un ivrogne, un ami des publicains et des pécheurs” » (Lc 7, 34). Nous avons vu dans sa Transfiguration la parfaite pureté de son corps. Lors de l’expulsion des vendeurs du Temple, nous avons admiré sa maîtrise de soi, l’amour ne s’emporte pas – aucune explosion de colère. Nous avons admiré sa générosité, au contraire de l’avarice, la joie profonde de son service de la charité. Dimanche dernier, nous avons vu que c’est par jalousie qu’il avait été livré, lui qui au contraire n’a fait que donner, tout donner jusqu’à sa propre vie.

En ce jour d’institution de la Messe mais aussi de la Prêtrise, priez pour vos prêtres, pour qu’ils soient à l’image du Christ : sobres, chastes, calmes, généreux, dynamiques, désintéressés … On pourrait ajouter : tempérants, prudents, justes, résistants.

Prier pour les vocations, c’est prier pour notre conversion !

A tous, pour communier à cette perfection du Christ, le recevoir hostie pour le devenir dans notre vie. Le recevoir avec ce qui donne son sens à tout ce qui précède : l’humilité.

L’humilité est la synthèse de toutes les qualités ; l’orgueil est la synthèse de tous les péchés. Dans sa catéchèse du 6 mars dernier sur l’orgueil, le Pape François insistait sur la gradation des péchés : « on part des péchés les plus grossiers, comme la gourmandise, pour arriver aux monstres les plus inquiétants. De tous les vices, l’orgueil est grande reine ».

« Il n’y a pas grand-chose à faire avec un orgueilleux, car il n’est plus présent à lui-même. Il faut être patient avec lui, car un jour son édifice s’écroulera. Un proverbe italien dit : « L’orgueil va à cheval et revient à pied » ».

Il faut être patient avec l’orgueilleux. A ses disciples qui voulaient siéger à sa gauche et à sa droite dans la Gloire, Jésus avait répondu : « Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire, être baptisé du baptême dans lequel je vais être plongé ? » (Mc 10, 38).

Cette coupe de l’humilité est la coupe à laquelle le prêtre boit à chaque messe en votre nom, de même que c’est en votre nom que je vais faire ce lavement des pieds pour que nous fassions tous ainsi, les uns avec les autres.

Le sang de Jésus est la coupe de l’humilité. Son sang nous purifie de tout péché, dit la 1ère Lettre de saint Jean (1 Jn 1, 7). « Le sang de Jésus nous purifie de tout péché. Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous égarons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous. Si nous reconnaissons nos péchés, lui, Jésus, qui est fidèle et juste, va jusqu’à pardonner nos péchés ».

Seigneur, lave-moi tout entier !

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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