Solennité du Christ Roi - 24 novembre 2024

Jn 18, 33b-37

 

La royauté divine se distingue de toute autre royauté par la façon dont elle fait usage de ses pouvoirs, des trois pouvoirs constitutifs de la royauté : législatif, judiciaire et exécutif. La royauté divine détient le pouvoir législatif, retient le pouvoir judiciaire, s’abstient du pouvoir exécutif.

Je m’explique.

Elle détient le pouvoir législatif : la Loi comme don de Dieu est l’événement central de l’Ancienne Alliance, auquel succède le don de l’Esprit dans la Nouvelle Alliance, qui lui en donne tout son sens : « Toute la Loi est accomplie dans l’unique parole que voici : Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (cf. Lv 19, 18 ; Gal 5, 14). Le pouvoir législatif divin tient tout entier dans le double commandement de l’amour.

Elle retient son pouvoir judiciaire jusqu’au retour du Christ quand il viendra juger les vivants et les morts. Pour l’instant, sur le chemin de la vie, « ce chemin qui débouche sur sa Gloire » dit la prière de la ‘Messe pour demander la grâce d’une bonne mort’ (« en paix avec Dieu et avec tous »), « Jésus nous accompagne comme un ami ».

Elle s’abstient du pouvoir exécutif, en particulier d’ordre et de police, comme le signifie Jésus dans sa réponse à Pilate : « si ma royauté était de ce monde, j’aurais des gardes qui se seraient battus » (pour moi).
Le nom de sacrement de l’ordre pour la prêtrise prête à confusion car nous ne sommes pas des gendarmes ni des douaniers : nous n’avons pas de contrôles à faire. Nous croyons sur parole.

Il faut arrêter de dire que Dieu permet le mal. Il l’interdit mais il ne l’empêche pas parce que Dieu n’est pas là pour contrôler ce que nous faisons. L’amour supporte tout, il endure tout, il résiste à tout, aux épreuves comme aux tentations, la plus grande tentation étant de vouloir tout contrôler et tout maîtriser.

Quel est le contraire du contrôle ? C’est l’amitié.

Du Christ-Roi de l’univers, nous sommes les sujets, assujettis (ce terme est plus audible que soumis) à sa Volonté, mais nous sommes également, si nous le voulons, ses amis.

Le Christ est notre Roi et nous sommes ses amis.

Nous sommes ses amis si nous faisons ce qu’il nous commande. « Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ignore ce que veut faire son maître ; maintenant, je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai appris de mon Père, je vous l’ai fait connaître. Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres » (Jn 15, 9 …17).

Mes amis. Pourquoi Jésus ne dit-il pas « mes frères » ?

L’expression apparaît après la Résurrection quand le Christ devient « l’aîné d’une multitude de frères » par son Ascension à la droite du Père : « je monte vers mon Père et votre Père ».

Il faut surtout attendre la Pentecôte et la naissance de l’Eglise, car la fraternité s’inscrit dans une filiation et nous relie à une communauté dont nous sommes tous responsables, à des degrés divers, avec chacun l’obligation de contribuer et de veiller au bien commun.
La fraternité oblige à la justice : s’occuper de ses frères les plus vulnérables n’est pas une question de charité mais de justice.

La fraternité oblige à la justice : c’est la différence entre un frère et un ami.

Il y a une liberté dans l’amitié qui n’existe pas dans la fraternité, ne serait-ce que parce qu’on ne l’a pas choisie : on ne choisit pas sa famille, on choisit ses amis. Le lien fraternel est un lien qui nous oblige à l’égard de nos frères, au nom de la justice. Le lien fraternel est subordonné au bien commun. Cela peut aller jusqu’à l’exclusion du frère ou de la sœur qui ne respecterait pas la Loi ni les autres membres de sa famille. C’est malheureusement ce que l’on n’a pas fait dans l’Eglise.

L’amitié, elle, peut s’affranchir de la justice pour être comme Dieu indulgence et Miséricorde. On pardonne tout à un ami si vraiment c’est un ami.

Voyez ce beau chemin qui nous est tracé où Jésus nous accompagne comme un ami jusqu’à la maison du Père, nous laissant libres de le reconnaître comme Notre Père, pour nous aimer les uns les autres comme des frères dans le Christ.

Le moyen simple de s’en souvenir sont les quatre lettres du mot ‘sauf’ (du verbe sauver) : serviteurs, amis, unis, frères.

Serviteurs du Roi, Amis de Jésus, Unis dans l’Esprit, Frères du Christ Ressuscité.

On ne choisit pas son Roi ; on choisit d’être son ami.

Puissions-nous dire au Christ : Mon Roi et mon Ami !

Père Christian Lancrey-Javal, curé

Vous avez la possibilité de recevoir les homélies du Père Lancrey-Javal en remplissant ce formulaire

Article précédent
On n’a qu’une seule vie
Article suivant
Pour que le Christ vive en nous