27ème Dimanche du Temps Ordinaire - 3 octobre 2021

Mc 10, 2-16

 

Femmes, soyez soumises à votre mari. Le problème n’est pas que la phrase figure dans deux passages de saint Paul, de la Lettre aux Ephésiens (Ep 5, 21-32) et aux Colossiens (Col 3, 12-21), mais que l’Eglise les fasse lire le dimanche, le 22 août dernier et un dimanche de la Sainte Famille après Noël. En août, la jeune femme que je mariais le samedi suivant m’a appelé très inquiète de savoir si c’était ce à quoi elle s’engageait ?
Le texte commence ainsi : « Frères, par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres », par respect pour le Christ puisqu’il s’est fait obéissant jusqu’à la mort (Ph 2, 8), lui qui, enfant, était soumis à ses parents (Lc 2, 51).
Et Paul poursuit : « les femmes, à leur mari, comme au Seigneur Jésus. Car, pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l’Église, le Christ est la tête, lui qui est le Sauveur de son corps. Eh bien ! puisque l’Église se soumet au Christ, qu’il en soit toujours de même pour les femmes à l’égard de leur mari ». Le propos est raide !
D’autant que le terme employé pour les hommes n’est pas le même : « Vous, les hommes, aimez votre femme », même s’il ajoute : « à l’exemple du Christ », ce qui m’a fait dire à ma fiancée : les hommes doivent mourir pour leur femme comme Jésus sur la Croix. Que préfères-tu : être soumise ou mourir ? Elle a paru rassurée.

Je reviendrai sur le sujet dimanche prochain, pour me limiter aujourd’hui à trois réflexions préalables sur la Parole de Dieu : sa forme, son esprit et son sens religieux.

Plus on a fait d’études et moins on supporte d’être commandé. Plus on fait d’études et plus on a, normalement, un sens critique et un besoin de comprendre ce que l’on fait. A condition que ces études donnent les moyens d’analyse et de réflexion, dont le principal est le langage : pas de pensée juste sans maîtrise du langage. Il n’est pas sûr que les nouvelles générations soient sur ce point mieux loties que celles qui les ont précédées. Le taux de réussite au bac devrait les inquiéter. Chaque génération regarde avec mépris celles qui l’ont précédée, persuadée de faire mieux. Ce qui est nouveau est que les aînés se laissent impressionner et déstabiliser. Il ne doit pas en être ainsi pour nous si nous voulons être fidèles au Christ qui ne s’est pas adressé à un peuple ni une époque donnée mais à toute personne ‘de bonne volonté’ entendez par là qui ne rejette pas, a priori, ce qu’elle ne comprend pas.
Etre fidèle au Christ suppose que nous donnions l’exemple par le respect de la parole donnée et l’attention aux petits, sans esprit de jalousie ni de rivalité.

Pourquoi les paroles de Dieu et les enseignements de l’Eglise ont-ils cette forme dérangeante (pour nous aujourd’hui) de commandements et d’interdits ?
La raison est qu’ils sont pour tous les âges et tous les temps, car les petits ont besoin d’ordres clairs. Les parents naïfs peuvent demander aux enfants s’ils ont envie d’aller se coucher, envie de se laver, de manger équilibré, envie de faire attention aux autres – ils seront ramenés à la réalité. Léon Bloy disait de façon provocatrice que la démocratie est l’élection du père de famille par ses enfants, et il n’y a que des Occidentaux idéalistes pour s’étonner des difficultés des peuples à se gouverner.

Tant mieux pour vous si vous avez la capacité de vous passer des commandements de Dieu et de l’Eglise. Pour ce qui me concerne, j’ai choisi la prudence : l’Eglise est ma mère.

S’agissant de ses enseignements sur le mariage et la sexualité, l’Eglise montre un chemin, le Christ, le Chemin, la Vérité et la Vie, et pour les baptisés un chemin de vie. Sur l’intimité du couple, l’objectif est que l’homme et la femme aient une connaissance de leur corps et du corps de l’autre, et qu’ils accèdent, l’homme surtout, à une maîtrise de soi et de leurs désirs. Il est beau ce chemin de connaissance de l’autre et de maîtrise de soi ! Qui ne voudrait y adhérer ?

Tel est, après la forme impérative, faite pour tous, l’esprit de la Parole de Dieu : une direction et un chemin. Venons-en à l’essentiel, au sens religieux, la vie éternelle. Il faut arrêter d’être surpris par la mort. Bouleversé évidemment, surpris non. On entend dire : ‘c’est injuste’. Non, la mort n’est pas une injustice. Abus de langage, erreur de pensée. La mort n’est pas une injustice : l’infidélité, le mensonge, la trahison, oui. Le fait de ne pas tenir parole, de renier ses engagements, sans demander l’accord des personnes concernées.

« Pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l’Église, le Christ est la tête, lui qui est le Sauveur de son corps ». Sauf que, dans le couple, les deux sont pécheurs : l’homme n’est pas le Christ pas plus que la femme l’Eglise. Ils sont appelés à devenir une seule chair pour éprouver, comprendre ce que l’autre ressent.
Il ne s’agit pas tant d’être soumis que d’être unis : « unis les uns aux autres par l’affection fraternelle, rivalisant de respect les uns pour les autres. Ayez la joie de l’espérance, tenez bon dans l’épreuve, soyez assidus à la prière. Soyez joyeux avec ceux qui sont dans la joie et pleurez avec ceux qui pleurent » (Rm 12, 15). Unis, pas soumis.

Pourquoi ne pas dire aux fiancés : ‘si vous ne voulez pas devenir des Saints, ne vous mariez pas à l’Eglise’ ? Parce que Jésus n’a pas dit à ses disciples quand il les a appelés : Je vais mourir sur la Croix et vous martyrs. Il leur a dit : Venez à ma suite.
Nous prévenons les fiancés que le basculement de leur vie sera, s’il n’a pas déjà eu lieu, la naissance des enfants, l’éducation des enfants, lorsque les parents ne peuvent plus vivre pour eux-mêmes, et doivent donner l’exemple de l’union au Christ, dans l’Eglise.

L’Eglise a deux missions fondamentales : préparer à la mort et aider les parents à donner la vie éternelle. La passion du Christ et la compassion de nos frères.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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