2ème dimanche du Pâques - 7 avril 2024

Jn 20, 19-31

 

Dimanche de la Miséricorde

Je vous propose de mettre à profit ce Temps de Pâques pour approfondir la question des fins dernières – ce qui se passe après la mort, puisque nous ne pouvons pas dire que personne n’en est revenu : le Christ, si ! Il est apparu à ses disciples. C’est le cœur de notre foi : si le Christ n’est pas ressuscité d’entre les morts, alors vaine est notre foi (1 Co 15, 14. 17).

Depuis plus d’un siècle, depuis l’encyclique Rerum novarum de Léon XIII en 1891, il y a eu au moins une douzaine de grands textes magistériels de Doctrine sociale : Quadragesimo anno de Pie XI en 1931 ; Mater et Magistra en 1961 ; Pacem in terris en 63 ; Gaudium et spes  en 65 ; Populorum progressio en 67 ; Octogesima adveniens en 71 ; Laborens exercens en 81 ; Sollicitudo Rei Socialis en 87 ; Centesimus annus en 91 ; Caritas in veritate en 2009 ; Laudato si en 2015 …
Et quasiment aucun sur les fins dernières ! Le seul qui s’y apparente est l’encyclique Spe Salvi de Benoît XVI sur l’Espérance, qui faisait ce constat d’échec que la vie éternelle ne fait plus envie.

Or nous ne pouvons pas comprendre la Miséricorde si nous la dissocions du Jugement. Nous en ferions une exonération de responsabilité alors que les fins dernières sont un appel à la responsabilité, au sérieux de la vie. A ses disciples qui l’avaient abandonné, Jésus ne dit pas : ‘ce n’est pas grave’. Au contraire, il leur montre ses plaies, et leur parle de rémission des péchés. Et quand Dieu parle de rémission des péchés, il ne s’agit pas de ceux des autres.

La Bonne Nouvelle de Pâques est le retour de Jésus auprès de ses disciples : cet évangile est un texte de retrouvailles. Ce que sont à leur façon les paraboles de la Miséricorde de saint Luc : retrouvailles d’une brebis perdue, d’une pièce égarée, du fils dévoyé et d’un père prodigue. Ces retrouvailles sont une promesse du Christ : « Quand je serai parti vous préparer une place, je reviendrai et je vous emmènerai auprès de moi, afin que là où je suis, vous soyez, vous aussi » (Jn 14, 3).
Nous serons avec le Christ, avec, c’est notre espérance ! les personnes que nous avons aimées, qui nous manquent. Notre espérance n’est-elle pas de retrouver nos chers défunts ?

Mais comment est-ce que cela se passera pour les personnes que nous n’avons pas envie, mais alors pas du tout envie de revoir et de retrouver ?

Est-ce que nous ferons miséricorde ? Est-ce que nous serons « miséricordieux comme Notre Père est miséricordieux » (Lc 6, 36) ?

Pour pardonner, il faudra déjà que nous soyons nous-mêmes pardonnés, que nous ayons fait et que nous gardions vivante l’expérience et la joie du pardon.

Voyez la difficulté que nous avons eue cette année encore pour nous confesser pour Pâques. Nous n’aimons pas ça. Nous n’aimons pas reconnaître nos torts, reconnaître que nous avons péché.
L’Église re-commande de nous confesser au moins une fois par an, presque indépendamment de nos péchés : sachant que les péchés véniels sont pardonnés à chaque messe, aux fidèles pratiquants qui ne font aucun péché grave, l’Eglise demande de se confesser quand même une fois par an pour vérifier qu’ils en sont capables : capables de demander pardon. C’est une sorte d’exercice incendie, en prévision de ce que nous aurons à dire au jour de notre mort : Pardonne-moi Seigneur.
La confession, comme tous les sacrements, a cette vertu ‘eschatologique’ de nous préparer à la rencontre du Christ à l’heure de notre mort.

Comment savons-nous que nous sommes pardonnés ? Par la joie éprouvée ! Par la foi de l’Église. Et par notre capacité à pardonner à notre tour, comme le montre la parabole dite du débiteur impitoyable : “Serviteur mauvais ! lui dit le Maître, je t’avais remis toute cette dette parce que tu m’avais supplié. Ne devais-tu pas, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon, comme moi-même j’avais eu pitié de toi ?” (Mt 18, 33).

Mes Amis, il y a des personnes que vous ne voulez plus voir ou qui ne veulent plus vous voir. C’est une loi de la vie. Nous connaissons tous des personnes irrémédiablement brouillées, qui ne se parlent plus, qui refusent catégoriquement de se revoir, sans qu’on sache et parfois sans qu’elles sachent vraiment pourquoi, et qui, si jamais vous voulez les inviter ensemble, refusent : ‘si elle vient, je ne viens pas’. Incapables de se mettre à la même table.
Que feront-elles, à l’heure de leur mort, quand, arrivant devant le Christ, elles verront cette ou ces personnes qu’elles détestent auprès de Lui ? ‘C’est elle ou moi’ ?

Qu’est-ce que la Miséricorde ?

Elle est le secours de Dieu pour nous retrouver auprès de lui et unis en Lui. Elle est liée à notre nature blessée : elle n’existera plus au Paradis. Elle est l’amour de Dieu pour les pécheurs, pour chaque personne malgré ses péchés.

Cet amour ou ce secours a trois caractéristiques : il est apaisant. Il donne la paix. « La paix soit avec vous ! ». Les disciples étaient bouleversés : ils furent remplis de joie en voyant le Seigneur. Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! ». Le mot-clé est apaisant. La Miséricorde donne la paix et fait la paix avec Dieu et, quand c’est possible, entre nous.

Les évangiles insistent sur la venue ou la présence du Christ ressuscité à un repas. Jésus demande à ses disciples : « Auriez-vous quelque chose à manger ? » (Lc 24, 41. Jn 21, 5). La Miséricorde donne des forces. Le mot-clé ici est ‘nourrissant’. Il les nourrit de sa Parole, leur ouvre le cœur à l’intelligence des Ecritures parce que l’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.

Apaisante, nourrissante, la Miséricorde est également inspirante. Elle veut le bien et pousse au bien, à la bienveillance, à la patience, à l’indulgence. Ne devons-nous pas avoir pitié de nos frères comme le Seigneur a eu pitié de nous, jusqu’à mourir pour nous et mourir sur la Croix ?

Apaisante, nourrissante, inspirante, reflet resplendissant de la Trinité Sainte, par la paix de Dieu, la Parole et le Pain de Vie du Fils, le souffle de l’Esprit, la Miséricorde est la tendresse et le secours dont nous avons besoin en cette vie pour nous préparer à la rencontre du Christ.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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