1er dimanche du Carême - 18 février 2018

Mc 1, 12-15

 

Je vous propose pour ce Carême une série de réflexions sur la sexualité. Si cela vous rebute, ce sera votre carême. « Aujourd’hui le tabou n’est plus le sexe, mais Dieu » disait dans une de ses premières interviews notre Archevêque Michel. J’ai choisi, à cause de l’arc-en-ciel de la 1ère lecture, symbole d’universalité depuis détourné en symbole de minorité, de commencer par l’homosexualité qui est, avec la contraception, un des deux grands points d’achoppement du discours de l’Eglise avec le monde.

Dans les deux cas, le message de l’Eglise semble inaudible qui repose sur le lien entre union intime et procréation. La foi catholique ne reconnaît pas la pratique homosexuelle comme susceptible d’être consacrée car nous tenons à garder unies union et procréation. Cela ne veut pas dire que tout acte sexuel doive donner la vie, mais soit potentiellement et symboliquement susceptible de l’être, manifestant ainsi sa grandeur, sa beauté, et la responsabilité de la personne. Tu n’auras pas de relation intime avec une personne dont tu ne voudrais pas ou tu ne pourrais pas avoir un enfant, car ce serait contraire à la nature vivifiante de l’amour : « il est Seigneur et il donne la vie ».

Cet enseignement est exigeant : il exige que nos relations, amoureuses, soient vraies, sincères, durables, ce qu’elles ne sont pas toujours. Dans son message pour le Carême, le Pape François met en garde contre les faux prophètes, qui sont comme des charmeurs de serpents, qui utilisent les émotions humaines pour manipuler les personnes. « Que d’enfants de Dieu se laissent séduire par l’attraction des plaisirs fugaces confondus avec le bonheur ! ». Quand ce ne sont pas des relations jetables.

Notre enseignement sur la sexualité est difficile à entendre : devons-nous y renoncer ? Ou le rendre accessible ?

Nous devons rendre le sujet moins excluant puisque la mission de l’Eglise est d’unir et réunir. Jésus est venu « afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés » (Jn 11, 52). La sexualité est un sujet ‘excluant’ qui parle différemment aux hommes et aux femmes, aux personnes qui ont des enfants et celles qui n’en ont pas, aux enfants et aux vieillards, aux riches et aux pauvres.

La messe, la célébration liturgique de l’amour divin a été instaurée lors d’un repas, et reprend la forme universelle du repas, du besoin universel de manger, par différence avec les rites charnels et pratiques idolâtriques évoquées dans la Bible de prostitution sacrée. Dans les premières communautés chrétiennes, le geste de paix se faisait ingénument par un baiser sur la bouche : il y a eu des dérapages et on a dû s’écarter  …

La sexualité touche diversement les personnes. Elle n’est pas pour l’être humain un besoin animal, voyez l’indignation de nos contemporains pour ceux qui se comportent comme des porcs – elle est de l’ordre du désir et non pas du besoin, et un appel à la dignité.
Elle est la forme la plus intime de l’union amoureuse de deux personnes. Il est logique que cette intimité comme cette unité dans la fidélité soit les proies privilégiées du Diviseur.

Sur l’homosexualité, il y a le choix résolu du Christ et de l’Esprit-Saint de ne pas en parler dans l’évangile. C’est un tabou : un interdit de parole, un sujet dont il faut éviter de parler, pourquoi ? Parce qu’ils n’étaient et ne sont qu’une minorité ? Dieu ne raisonne pas ainsi, au contraire. Pour nous appeler à la prudence. Pourquoi parlerions-nous de ce dont le Christ ne parle pas ? Et qui existait à son époque.

Différents termes sont utilisés par l’Ecriture, dans la Bible, et par la Tradition, le Catéchisme, qui nécessitent de grandes précautions. Disons du mot ‘abomination’ auquel une femme politique avait cru bon de recourir, qu’il est navrant qu’aucun évêque, porte-parole de l’Eglise ne soit intervenu pour corriger le propos et intimer le respect. Nous devons présenter des excuses et demander pardon aux personnes qui ont été blessées par ce mot ou d’autres propos aussi irrespectueux.
S’agissant du terme employé par le Catéchisme de ‘désordre’, il s’applique à la totalité des relations sexuelles en dehors du mariage chrétien fondé sur la fidélité de l’homme et de la femme et leur ouverture à la vie. Le mot n’est pas outrageant : il est employé par saint Paul pour ceux qui ne veulent pas travailler, et qui vivent « de façon désordonnée » (2 Th 3, 7). Le Catéchisme considère comme un désordre toute recherche égoïste de plaisir, pas seulement sur le plan sexuel. Nous ne considérons pas le plaisir sexuel comme une fin en soi. Ni le travail. Ce sont des moyens du bonheur. Nous pouvons dire qu’une pratique religieuse irrégulière, aller à la messe de temps en temps est un désordre. Pourquoi ? L’amour a besoin de stabilité. Est-ce qu’il vaut mieux un couple homosexuel stable que des relations hétérosexuelles désordonnées et infidèles ? Dieu seul est juge.

Pourquoi ne pas accorder aux personnes homosexuelles une place dans l’Eglise ? On touche au sujet inadapté de la reconnaissance sociale : sortons de ce conflit stérile entre ceux qui voudraient les faire entrer dans l’Eglise pour accorder cette reconnaissance et ceux qui s’emploient à les chasser. L’Eglise n’est pas une société parfaite où devraient se retrouver toutes les pratiques humaines : l’Eglise demande à ses enfants de respecter en son sein une neutralité, une chasteté digne de la sainte Famille.

L’Eglise n’est pas une assemblée constituante où toutes les situations de vie devraient être représentées et honorées. L’Eglise n’est pas l’Arche de Noé. L’Eglise est le Corps du Christ, victorieux du Diable et de toutes les tentations, dont la mission est féconde, d’engendrer tout être humain à la vie éternelle. C’est pourquoi nous ne reconnaissons pas les pratiques sexuelles qui ne sont pas ouvertes à la vie, qui ne comportent pas symboliquement ce lien entre union et fécondité, entre communion et filiation, qui inscrit toute relation intime dans une génération de l’homme et de la femme.

Est-il injuste de la part de l’Eglise de reconnaître un statut différent aux personnes unies dans le mariage ou consacrées à Dieu, et à celles qui ont fait un choix différent de Joseph et Marie (qui harmonisent les deux, mariés et consacrés) ?

Ce qui est juste est ce qui nous ajuste à Dieu. Il n’est pas juste de tenir des propos sur l’homosexualité que le Christ n’aurait pas tenus. Silence ! dit Jésus au Diviseur.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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