30ème dimanche du temps ordinaire - 29 octobre 2023

Mt 22, 34-40

 

En langage chrétien, pour nous Catholiques, ‘commandement’ se dit ‘sacrement’, et ‘amour’ se dit ‘unité’. Par-dessus tout, dit saint Paul, « qu’il y ait l’amour : c’est lui qui fait l’unité dans la perfection » (Col 3, 14). L’unité autour du Christ, comme nous l’en prions à chaque messe en lui demandant la grâce de la paix et « conduis-nous vers l’unité parfaite, toi qui vis et règnes pour les siècles des siècles ».

L’unité dans la perfection, l’unité parfaite, c’est ce à quoi visent et servent les sacrements : à nous perfectionner. A nous rendre parfaits. « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait » dit Jésus (Mt 5, 48).

La Tradition spirituelle a utilisé ce nom de ‘parfaits’, avec une grande audace, pour désigner ceux qui cherchent à s’unir à Dieu, et à faire l’unité entre nous par le Christ, en distinguant trois démarches : la voie purgative des ‘commençants’, la voie illuminative des ‘progressants’ et la voie unitive des ‘parfaits’.

Assurément ce mot ‘parfait’ se prête à la moquerie, mais ne l’utilisons-nous pas couramment lorsque nous avons trouvé un accord sur un rendez-vous ou sur la composition d’un texte : ‘c’est parfait’ ? Bien sûr que ça ne l’est pas, au sens absolu, rien n’est jamais parfait, Dieu seul est parfait. Mais, au quotidien, dire que c’est parfait signifie que nous sommes parvenus à un accord, et c’est immense.

Dans la vie spirituelle, la voie unitive des ‘parfaits’ n’exonère pas de la poursuite du travail des deux voies purgative et illuminative.
Nous le célèbrerons cette semaine : nous fêterons mercredi à la Toussaint les Saints et les Saintes parvenus à la perfection de la vision de Dieu, et nous prierons le lendemain, aux messes des Défunts, pour ceux qui, au Purgatoire, « étant assurés de leur salut éternel », ont encore besoin de purification pour entrer dans l’illumination céleste, la vision de Dieu, « la béatitude du ciel » (Abrégé – ‘Compendium’ du Catéchisme de l’Eglise Catholique n. 210).

Ces trois voies purgative, illuminative et unitive sont comparables à la foi, l’espérance et la charité : la plus grande des trois c’est la Charité, l’union à Dieu et l’unité entre nous. C’est la raison pour laquelle nous venons à la messe : pour nous unir à Dieu, par la Communion au Corps du Christ.

Comment ces trois voies s’agencent-elles entre elles ?

L’entrée se fait par la voie illuminative, la lumière du Christ et de l’Esprit-Saint : conduits par le Christ, poussés par l’Esprit, nous allons de l’avant, nous courons vers Dieu, en cherchant à nous alléger, nous purifier et nous débarrasser de tant d’attachements inutiles, les plus divers et les plus désordonnés.

A la messe, nous commençons par la voie purgative, en demandant pardon. En réalité, dans notre cœur comme dans notre vie, nous commençons par l’illumination, le don du baptême, le don de la foi, l’entrée dans l’invisible (à nos yeux de chair).

Cette vision suppose l’écoute de la Parole de Dieu, qu’il y ait eu annonce et prédication : « la foi naît de ce que l’on entend ; et ce que l’on entend, c’est la parole du Christ » (Rm 10, 17).

Et saint Jean, au début de sa 1ère Lettre, décrit la même séquence : « Ce qui était depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous vous l’annonçons » (1 Jn 1, 1).
Il faut avoir entendu le message d’amour de Dieu pour voir les autres avec les yeux de la foi : il faut avoir accueilli l’amour de Dieu pour être capable de l’adorer de tout son être, laisser cet amour nous envahir, nous purifier, pour nous aimer les uns les autres, aimer son prochain comme soi-même, le reconnaître comme un frère et non comme un ennemi.

C’est pourquoi, si le ‘grand commandement’ est d’aimer Dieu, le premier dans l’ordre chronologique c’est : « Ecoute ! ». Ecoute Israël.

Un samedi matin il y a des années, j’étais à l’accueil d’une paroisse, quand un homme est arrivé en trombe et m’a demandé : ‘Que dit la Bible quand on a tué quelqu’un ?’. J’ai été un peu pris de court : je lui ai répondu que la Bible dit de ne pas tuer.
C’est la réponse que Jésus fait au jeune homme riche, qui lui demandait ce qu’il devait « faire de bon pour avoir la vie éternelle ? » Jésus lui répondit : « Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements. » L’autre lui dit : « Lesquels ? » Jésus reprit : « Tu ne tueras pas ».
Ce n’est pas la réponse qu’il fait au docteur de la Loi, qui est un enseignant. C’est la réponse qu’il fait à un commençant ou un progressant, les interdits fondamentaux : « Tu ne commettras pas de meurtre. Tu ne commettras pas d’adultère. Tu ne commettras pas de vol. Tu ne porteras pas de faux témoignage » (Mt 19, 19).

Tu ne tueras pas. Tu ne seras pas infidèle, ni complice. Tu ne voleras pas. Tu ne mentiras pas. Si on se contentait de cela, on vivrait dans la paix !

Mon visiteur m’a répondu qu’il avait déjà tué, deux personnes, et la question pour lui était de savoir comment sortir de cet engrenage.

C’est la vraie question : comment sortir d’un engrenage. Comment est-ce qu’on sort de l’engrenage du péché ?

Pour nous Catholiques, ce n’est pas seulement par le respect des commandements : pour nous, la réponse nous a été donnée par Jésus-Christ : les sacrements et la prière, les sacrements étant la forme la plus haute et la plus accomplie de la prière.

C’est le double rôle des sacrements : nous unir à Dieu et faire l’unité entre nous par le Christ.

Unis au Christ, autour du Christ et par le Christ.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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