1er dimanche de l'Avent - 27 novembre 2022

Mt 24, 37-44

 

Lorsqu’un prêtre meurt, qui se charge de ses obsèques ? A qui revient-il, à qui appartient-il de les organiser : à l’Eglise ou à sa famille ? Un ami de séminaire, le Père Gaël Réhault est mort cet été à 51 ans alors qu’il était atteint depuis plusieurs années d’une maladie dégénérative terriblement invalidante. Il a été enterré avec les prêtres de Paris au cimetière du Montparnasse dans la Chapelle des Saints Apôtres. J’ai le souvenir d’un camarade modèle au Séminaire, édifiant, le plus saint d’entre nous. Son service de l’Eglise je ne sais pas, mais son attitude dans la maladie a été admirable : il s’est uni à la Passion du Christ pour le pardon de nos péchés. Il a été admirablement soutenu par les prêtres avec qui il habitait, des frères, une vraie famille. Quand on pense à la famille, on pense aux enfants, leur croissance, leur épanouissement, leur éducation. Le rôle de la famille est tout autant de soutenir et d’accompagner ses membres malades, affaiblis par le grand âge, le handicap ou la maladie. C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples, dit Jésus (Jn 15, 35).

Ce n’est pas très fun ? Non. C’est pourtant une source de joie profonde, qui donne le sens de la vie, qui n’est pas de vivre pour soi mais pour les autres, de façon gratuite et désintéressée. Quel est le sens de la vie ? C’est l’amour ! Et c’est exaltant, enthousiasmant, Magnificat ! s’écrie la Vierge Marie à la Visitation, lorsque, poussée par l’Esprit Saint, elle se rend auprès de sa parente, Elisabeth, pour être auprès d’elle dans ce qui était, même si l’expression est anachronique, une grossesse à risque vu son âge.

Qu’est-ce qui fait une famille ? Difficile à définir, d’en délimiter le périmètre, d’en fixer les critères d’appartenance, surtout de nos jours avec les engagements successifs, les abandons, les recompositions, les alliances en tous genres, les unions de même sexe.

Maison ou Famille de Jacob dit la 1ère lecture, ça veut dire quoi pour nous, celle que dira Jésus du Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ? Ou Jacob est-il celui qui se réconcilie avec son frère après avoir lutté contre Dieu, dans ce passage sublime du combat contre l’Ange ?

Qui est ma famille ? Jésus a répondu quand on lui a dit que sa mère et ses frères cherchaient à le voir : ma famille, ce sont ceux qui écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique. « Celui qui fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère » (Mc 3, 35 ; Mt 12, 49). C’était l’évangile de la fête lundi dernier de la Présentation de la Vierge Marie, quand ses parents, alors qu’elle avait trois ans, l’ont consacrée au Seigneur, comme tous les parents chrétiens s’y sont engagés au jour de leur mariage. Comment voulez-vous que des enfants respectent des parents qui ne tiennent pas leurs engagements ?

La famille, pour nous Catholiques, n’est pas une communauté fonctionnelle, comme l’est une communauté de travail que Jésus évoque dans l’évangile de ce dimanche par ces deux hommes aux champs ou ces deux femmes au moulin en train de moudre. La famille, au sens chrétien, ne peut pas non plus être seulement une communauté de vie comme il en existait lors de l’Alliance avec Noé quand « on mangeait et on buvait, on prenait femme et on prenait mari ». Ce ne sont pas les repas en commun, ni les relations de couples qui font une famille : la famille est moins une origine qu’une espérance. On pourrait dire une convergence. Venez, maison, famille de Jacob ! Marchons à la lumière du Seigneur : vers cette lumière, jusqu’à cette lumière.

En entrant dans l’Avent, nous avons pour perspective Noël, la fête et la messe qui sera pour beaucoup leur seule venue de l’année à l’Eglise. Ils viendront avec vous, pour vous faire plaisir, vous qui croyez en Dieu. A la Toussaint, j’ai célébré les obsèques d’une femme, mère et grand-mère très aimante, deux ans après la mort de son mari. Les enfants n’ont plus voulu de messe : ils m’ont dit ‘c’était la dernière croyante de la famille’ (sic). Une des petites-filles était voilée.

Nous avons quatre semaines pour nous y préparer. Pour penser à ce que nous attendons de notre famille et ce qu’elle attend de nous.

La famille chrétienne est une communauté de vie et d’amour, fondée sur l’égalité de l’homme et de la femme, des grands-parents et des petits-enfants, vivant dans le respect mutuel et dans « un effort constant » d’attention et de service. Le Pape Jean-Paul II a écrit en 1981 une exhortation Familiaris consortio sur le rôle de la famille chrétienne dans le monde d’aujourd’hui. Il y détaille quatre devoirs principaux, parfaits pour ces quatre dimanches qui nous conduiront à Noël, la fête de la famille.

Le premier devoir de la famille est la formation d’une communauté de personnes, communauté de vie et d’amour. Cela s’accomplit « à travers les soins et l’amour donnés aux jeunes enfants, aux malades, aux personnes âgées ; à travers les services réciproques de tous les jours ; dans le partage des biens, des joies et des souffrances » (Familiaris consortio n. 21).

Il n’y a rien de plus formateur que de s’occuper des autres, les plus faibles et les plus proches. C’est la meilleure formation à la louange de Dieu, et réciproquement.

Voilà un bon programme pour cette première semaine de l’Avent : où en sommes-nous de la communion en famille, l’unité dans l’égalité de traitement et de dignité ? Comment est-ce que l’amour s’y manifeste au quotidien, quelles sont les réparations, les réconciliations à mener, pour préparer la venue du Seigneur ?

La famille est moins une origine qu’une espérance.

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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