3ème dimanche de Carême - 12 mars 2023

Jn 4, 5-42

 

On peut se demander si l’équivalent dans l’Eglise aujourd’hui des Samaritains du temps de Jésus ne seraient pas les ‘Traditionalistes’ ? Je pense notamment à leur refus du pouvoir central, de Jérusalem ou de Rome, à leur attachement à des formes d’avant l’Exil ou la sécularisation.

J’ai lu sur un site ‘tradi’ la proposition d’un lecteur (facétieux) d’ajouter au Catéchisme de l’Eglise Catholique un paragraphe sur les ‘personnes traditionalistes’ qui paraphrase celui sur les ‘personnes homosexuelles’ (CEC n. 2358) – ça donnerait ceci : « Un nombre non négligeable d’hommes et de femmes présente des tendances ‘traditionalistes’ foncières. Cette propension, objectivement désordonnée, constitue pour la plupart d’entre eux une épreuve… Ils doivent être accueillis avec respect, compassion et délicatesse. On évitera à leur égard toute marque de discrimination injuste ».

Cela s’applique à tant de minorités : quelles minorités ne se sentent pas maltraitées ?

Sur l’homosexualité le pape François a suscité l’émoi au début de l’année quand il en a dénoncé la criminalisation dans tant de pays, plus de cinquante, une dizaine la punissent de mort, tout en rappelant ce que dit le Catéchisme, que les actes d’homosexualité « ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas » (CEC 2357). Ils sont « contraires à la loi naturelle. Ils ferment l’acte sexuel au don de la vie. Ils ne procèdent pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable ».

La doctrine catholique est aussi sévère avec l’adultère, l’infidélité dans le mariage, et ne parlons pas des relations libertines. Dans le sauvetage de la femme adultère, que nous entendions l’année dernière au 5ème dimanche de Carême, Jésus en refuse la criminalisation : « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre » comme toute approbation : « Va et ne pèche plus » (Jn 8, 11).

Sur bien des sujets délicats, l’avortement, l’euthanasie, la dépénalisation est une bonne solution d’équilibre et de conciliation, qui cherche à maintenir un ordre social et moral tout en renvoyant chacun à sa responsabilité personnelle, puisque que c’est devant Dieu que nous rendrons compte de nos actes.

De fait cette page d’évangile, de la rencontre de Jésus avec la Samaritaine, préfigure notre rencontre avec le Christ au moment de notre mort.
Que dit-il en effet à cette femme ? Que toutes les relations ne sont pas équivalentes. « Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari : des maris, tu en as eu cinq, et celui que tu as maintenant n’est pas ton mari ; là, tu dis vrai ».

Toutes les relations ne sont pas équivalentes, n’ont pas la même valeur, ne se valent pas.

Les religions non plus car c’est le sujet de discussion entre Jésus et cette femme qui l’interroge sur la religion de ses parents, sur le juste lieu de culte, sur cette montagne ou à Jérusalem ?

Jésus révolutionne l’approche religieuse en donnant trois critères d’évaluation d’une religion.

Le 1er s’appelle la Révélation : « Le salut vient des Juifs ». Cette donnée historique implique, 2ème critère, une transmission, un apprentissage, une connaissance et un travail de la raison : « Nous, nous adorons ce que nous connaissons ». 3ème critère, un engagement personnel, intérieur, de la personne toute entière car « Dieu est esprit, et ceux qui l’adorent, c’est en esprit et vérité qu’ils doivent l’adorer ».

Un triple critère : historique, catéchétique ou théologique, et spirituel.

C’est sur ces trois critères que repose notre foi, et nous serons jugés sur son application, l’amour. A commencer par l’amour de Dieu car, de toutes les relations qui nous constituent, nous sommes des êtres de relation, la plus importante est notre relation à Dieu. Et quand on n’a pas de relation à Dieu ? C’est déjà un choix. Et ce n’est pas manquer de respect à une personne que de ne pas approuver ses choix.

Maintenant, si toutes les relations ne se valent pas, lesquelles sont les meilleures ?

Celles qui conduisent au Christ. Celles qui favorisent sa rencontre, notre réponse à son appel, qui nous permettent de répondre à notre vocation, car, fondamentalement, il nous précède et nous appelle. Nous disons qu’il vient nous rejoindre là où nous en sommes ; en réalité, il est déjà là. Comme Jésus au bord du puits quand arrive cette femme. Quand, après la résurrection, l’Ange du Seigneur dit aux saintes femmes : « Il vous précède en Galilée ; là vous le verrez » (Mt 28, 7 ; Mc 16, 7), cela veut dire ‘chez vous’ ou ‘chez toi’, comme Jésus dit à ceux qu’il guérit de rentrer chez eux, à la maison, au plus profond de leur cœur.

Comment sait-on quelles sont les relations ‘qui conduisent au Christ’ ?

C’est facile : il les a bénies, incarnées, consacrées.
Bénies, pour toutes celles qu’il a accueillies positivement, ou montrées en exemple.
Incarnées, pour toutes celles qui relèvent de l’adoration du Père et de l’amour du prochain.
Consacrées, élevant ainsi le mariage de l’homme et de la femme au rang de sacrement.

Quant à imaginer qu’il y aurait des relations ‘auxquelles il n’aurait pas pensé’, c’est méconnaître qu’il est Dieu. « Vous êtes complètement dans l’erreur » dit Jésus à ceux qui voulaient le piéger sur le sort d’une femme qui aurait eu sept maris. Ce qui importe n’est pas de qui elle est l’épouse, mais de quel Dieu elle est l’enfant. Dieu Père, Fils et Saint-Esprit.

Ce sont les deux questions à se poser : sommes-nous ‘enfants de ce monde’ ou ‘enfants de Dieu, enfants de la résurrection’ ? (Lc 20, 36). Ne tardons pas trop à répondre : regardez, dit Jésus, « Levez les yeux et regardez les champs déjà dorés pour la moisson ».

L’autre question est redoutable : est-ce que les relations que j’entretiens sont ou seraient bénies, agréées par le Christ ? Est-ce que ce sont celles d’un enfant de Dieu ? Le Christ les aurait-il approuvées, assumées, sont-elles fidèles à son enseignement, compatibles avec mon amour pour lui ? Cherchez, dit saint Paul, ce qui plaît au Seigneur (Eph 5, 10).

En âme et conscience, est-ce que je cherche et que je fais ce qui plaît à Dieu ?

Père Christian Lancrey-Javal, curé

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